Après la partie administrative abordée dans l’article précédent, attardons-nous sur le deuxième volet du dossier justificatif de CIR : le dossier scientifique. Ce dernier sert à justifier du caractère novateur des travaux, au sens de la R&D. Là encore, c’est un exercice qui exige beaucoup de rigueur et de continuité. Encore plus que pour le dossier administratif, il se pose le problème de la perte de connaissances (due au possible turnover de personnel impliqué) impossibles à reconstituer à posteriori si les travaux n’ont pas été documentés en continu. Le CIR se défend à 70 % sur le contenu scientifique.
En résumé, le dossier scientifique doit :
– présenter les acteurs qui prennent part au processus de R&D, que la collaboration soit formelle (avec un laboratoire de recherche, par ex.) ou informelle
– expliquer le management de la documentation (processus bibliographique)
– indiquer les brevets éventuellement déposés
– décrire les ressources mises en œuvre. Dans le cas du domaine numérique, il peut s’agir de machines, de plateformes distribuées, d’équipes.
Au cours de la rédaction, il faut faire attention à respecter quelques points essentiels :
– définir un état de l’art académique (volet « R&D ») ou industriel (volet « innovation » du CIR ou CII) assorti d’une étude bibliographique solide et pertinente. C’est un vrai travail de publication de recherches, d’où l’intérêt d’avoir des gens formés à la recherche en interne.
– expliquer comment on a caractérisé ses travaux de R&D : décrire par exemple les verrous technologiques qui sont des obstacles techniques à l’obtention d’un résultat, mentionner les aléas de la démarche et les risques de ne pas aboutir, souligner les incertitudes théoriques. Il faut démontrer que vous n’avez pas réussi à surmonter ces obstacles avec l’état de l’art, par exemple, de l’ingénierie logicielle.
– montrer que vous adoptez une réelle démarche scientifique : poser un problème, rechercher si d’autres l’ont déjà résolu, et ensuite chercher à le résoudre. Il faut décrire le protocole de tests des prototypes, décrire aussi les problèmes persistants, revenir sur les risques. Montrez que le processus de R&D est cyclique et n’hésitez pas à mettre en avant vos échecs.
Pour finir, nous vous conseillons de présenter au moins 2 thèmes de R&D chaque année : un fort et un plus discutable, plus faible. Un thème peut très bien se retrouver d’une année sur l’autre. Cela démontre par ailleurs le caractère continu de la démarche, même si le processus est cyclique (arrêt du projet pendant quelques mois, puis reprise, etc.). Cela montre aussi que le processus dépend du contexte économique de l’entreprise qui n’est pas organisée comme un laboratoire public.