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Stratégie

Quel impact de l’inflation sur les salaires et coûts du secteur IT ?

Frédéric Lasnier
Frédéric Lasnier
Chief Executive Officer

Une chose est sûre, partout dans le monde les salaires des professions digitales n’ont pas attendu le début de l’accélération de l’inflation pour démarrer leur prodigieuse ascension.

inflation

Rattrapage des zones offshore et nearshore ? Pas vraiment.

Attention à l’effet valeur absolue. Un salarié américain à 150 000 dollars dont le salaire grimpe de 10% progresse de 15 000 dollars ; pendant que celui du Philippin à 25 000 dollars qui prend 15% ne progresse « que » de 3750 dollars. Une fois incorporé dans le coût du développement digital, on accuse un impact bien plus important de l’inflation américaine.

Si le rapport de coût qui était de 6 entre les deux pays est bien passé à 5,73, ce qui n’est pas énorme comme différence, il est pourtant probable que l’incitation à travailler en offshore a bel et bien progressé dans l’intervalle, favorisant la réduction des coûts.

Une course aux meilleurs talents du monde… attisée par le remote et les US.

Pas de doute sur le fait que les entreprises américaines, toujours mieux financées que les autres et en recherche des plus grands talents, continuent d’attiser les flammes. Un programmeur en remote qui gagnait entre 4000 et 5000 € depuis l’Europe avant la pandémie, peut tout à fait passer en freelance pour 10 à 12 000 $ par mois pour une entreprise américaine… qui peut en plus lui offrir des actions. Les écarts de revenus, de mode de travail, de participation financière et de culture sont devenus énormes et accessibles à tous ceux qui disposent d’une compétence technique digitale.

Dans le même temps la bonne nouvelle pour les travailleurs européens est que, pour certains d’entre eux qui sont exposés à la monnaie européenne (soit parce que leur salaire est calculé en euros, soit parce que leur monnaie locale est accrochée à l’Euro), c’est justement que le décrochage de l’Euro face au dollar les a rendus relativement attractifs par rapport à leurs confrères des US, du Canada et d’Amérique latine.

Quelques pays ont moins été exposés que d’autres à l’inflation. C’est le cas du Mexique, du Vietnam et de la Chine. Le Royaume Uni commence à ralentir sa surchauffe salariale tandis qu’elle s’accélère fortement en Allemagne et en France et se stabilise à haut niveau en Europe centrale et orientale. Partout elle s’affiche à 2 chiffres.

A coup sûr la guerre entre la Russie et l’Ukraine a affecté la disponibilité des développeurs de ces deux pays aux compétences majeures, attisant la spirale inflationniste.

Y-a-t-il un ralentissement digital ? Oui, mais un peu plus tard que prévu.

C’est une des questions les plus difficiles à trancher. D’après les observations réalisées par Pentalog HR sur le freelancing et le recrutement en Europe, le marché reste sur une demande très élevée. Mais une demande qui a connu une inflexion dans le courant de l’été 2022 par rapport à la folie du quatrième trimestre 2021 et du premier trimestre 2022. La réduction du marché du capital risque a provoqué un trou d’air dans beaucoup de startups en phase de financement, particulièrement dans le late stage.

En revanche jusqu’à ce jour, à l’exception du retail, les projets de transformation digitale des grandes entreprises ont peu été bousculés. A titre d’exemple, le marché automobile non seulement résiste encore, mais surtout l’électrification et la digitalisation doivent être conduites à marche forcée. Ce secteur sacrifié en 2020 devient plus porteur en 2022.

Il est aussi possible que les salariés tech du retail et de la fintech au Royaume-Uni soient incités à changer de job ou d’industrie, mais ils risquent d’y trouver des conditions moins favorables. Aux US, en France et en Allemagne, on n’en est pas au niveau britannique, mais ces deux secteurs connaissent un ralentissement notable également.

Une cryptocalypse ?

Le gigantesque et incroyable scandale FTX est en train de contaminer tout le secteur des cryptomonnaies, et de la Fintech par rebond. Sur un marché déjà bien critiqué pour ses opacités et son côté Far West, les malversations du fondateur de FTX d’une part, les fonds iraniens ayant transité par Binance de l’autre, les milliards de dollars partis en fumée, la panique des investisseurs et de l’écosystème : autant dire que le web3 traverse une passe plus que difficile ! Les annonces de licenciements des gros de la Silicon Valley sont symboliques de ce coup de frein à main brutal. Néanmoins ces entreprises en ont vu d’autres et les virages dans le domaine sont aussi brusques dans un sens que dans un autre. On a mille fois annoncé la fin de tel ou tel, mais le business a la dent dure.

En conclusion, on peut vraisemblablement tabler sur un ralentissement sensible du moteur digital dans l’économie au quatrième trimestre, comme le montrent les chiffres du e-commerce par exemple (au plus bas historique) ou ceux du financement des startup. Du côté de Gartner et Forrester, pour 2023 après le taux de croissance record de 10.2% en 2021 et du ralentissement drastique du rythme de croissance en 2022 à 0,8%, on reparle de 5% ou plus pour 2023. Simple effet de l’inflation, je ne sais pas. Mais la tendance est donnée par deux ou 3 indicateurs :

  • Software +11,3% après +8% en 2022
  • IT services en augmentation également
  • Le cloud (IaaS en hausse de 20.7% !)

Ces prévisions semblent corroborer nos propres observations, la tendance économique quoique difficile n’a pas provoqué à ce jour la récession massive attendue pour 2022. Les entreprises continuent de croire dans un futur digital et d’y chercher la solution pour sortir de la crise.

Ce qui reste rassurant pour notre industrie.


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